Actualités

Quelle posture en ce temps de dé-confinement ?

18 mai 2020

Quelle posture en ce temps de dé-confinement ?

Tout est organisé dans la société civile, l’Éducation Nationale, les entreprises, les transports, à Bellevue Marie-Rivier aussi, pour mettre en place les mesures barrières qui nous protègent de la contamination et de l’extension du virus Covid 19. Avec le dé-confinement, une porte s’ouvre sur l’extérieur du cocon familial, redonnant aux jeunes une marge d’autonomie et de responsabilité pour s’ajuster à de nouvelles relations.
Parents, éducateurs, enseignants, responsables et jeunes en devenir, si nous avons le devoir de baliser l’espace et la route, nous ne sommes pas tenus de faire ou de penser à la place de l’autre ! Adultes, lâchons du lest, ne projetons pas nos peurs et nos craintes sur les jeunes, même si elles sont légitimes. Une grande loi de la psychanalyse est d’affirmer que « tout être humain est le principe de son évolution. Il est partie prenante de la démarche, de sa vie. On n’obtient rien de lui, s’il n’y consent». (1)
Quelle posture revêt-on nous dans notre relation aux jeunes en ce temps de dé-confinement ?
Celle d’une relation d’aide, où je sers à quelque chose, me dévouant, induisant des comportements adaptés à la situation actuelle, m’oubliant parfois au risque d‘occulter mes propres sentiments et mes propres désirs.
Celle d’une relation éducative, qui autorise patiemment le jeune à se construire, au travers de ses questions, ses révoltes, ses doutes, ses agacements, ses erreurs, ses actions coopératives avec ses pairs, ses tentatives d’être comme les adultes souhaiteraient qu’ils soient ! Les paroles prononcées peuvent avoir une grande influence sur celui qui les reçoit et son avenir, « non pas parce qu’elles sont des vérités qui vont se vérifier à tout les coups, mais par leur pouvoir d’injonction » (2).
Celle d’une démarche d’exemplarité, où je me situe, en tant que modèle, comme celui qui sait, qui donne l’exemple et attends de l’autre qu’il m’imite dans ce que je pense être le mieux pour moi et pour lui. Excusez-moi, je rectifie, pour lui et pour moi ? Quoique ?
Celle d’une démarche « d’amour », faite de bienveillance, d’écoute, de retenue, de prévenance, d’affection… Oscillant entre bonté et dureté. Pas si simple dans l’ordinaire de notre quotidien, mais l’essentiel n’est-il pas d’essayer tous les jours un davantage qui n’exclut pas les zones d’ombres et de recul.
Ou bien celle d’une démarche d’alliance… Drôle de terme qui semble venir d’un au-delà de notre société contemporaine. Serait-ce mettre en commun nos forces, nos compétences, au sein d’un contrat, pour entreprendre et réaliser un objectif commun ? La science et la médecine aujourd’hui vivent, semble-t-il, cet idéal dans la recherche d’une solution sanitaire, à l’échelle mondiale, face à la pandémie. Les politiques adhèrent, en laissant émerger leur part d’humanité.
Elena Lassida (3), quant à elle, en termes d’Alliance, en référence à la Bible, nous parle d’incomplétude, de manque, de perte, de vulnérabilité, à mettre en commun, dans la transparence et l’authenticité de nos vies et du moment présent. Ce cri intérieur de « J’ai besoin de toi » appelle notre « moi aussi » pour grandir et vivre ensemble. N’est-ce pas, pour le croyant, le message qui traverse toute la Bible quand Dieu fait alliance avec l’humanité.
Dans les circonstances présentes, la prise de conscience de notre finitude, de notre vulnérabilité à tous, de notre interdépendance, face à la maladie, à la culpabilité d’être responsable de l’autre, nous entraîne à redécouvrir cette autre logique de l’Alliance. Mettre en jeu plus la confiance, que le raisonnement, plus la reconnaissance que les compétences, plus l’aveu de nos limites et de nos faiblesses, que la fuite dans le pouvoir et l’autoritarisme. Restons vigilant sur le regard que nous portons les uns sur les autres, comme le disaient Marie Rivier et St Vincent de Paul, « les fautes et les défauts des autres doivent plutôt exciter notre compassion que notre colère et notre indignation » (4).
Tout est liè (5)… Tout est relié … Tout est appelé à être délié, pour plus de vie et de fraternité. Avançons comme les oiseaux migrateurs en posture de coopération, volant en V , pour s’entraider les uns sur les autres et aller plus loin. Courage, quelqu’un a dit : « J’ai vaincu le monde » (6), en parlant de toutes ces forces qui nous entravent dans notre soif de liberté, d’existence et d’amour … Avec Lui ou sans Lui, selon notre chemin de vie, relevons la tête et avançons dignement, et tous ensemble, dans l’entraide et le respect vers demain qui rimera avec citoyen du monde !
Bien à vous.
Y.K

 

 

1 Cifali, M. (2005). Le lien éducatif : contre-jour psychanalytique. p.70

2 Cifali, M. (2005). Le lien éducatif : contre-jour psychanalytique. p.49

3 Eléna Lassida : Docteur en Sciences sociales, Responsable du pôle Écologie et Société à la Conférence des Evêques de France. Auteure du livre « le goût de l’autre, la crise, une chance pour réinventer le lien »

4 Marie Rivier Derniers avis. p. 44

5 Laudato si du Pape François

6 Jésus Christ. Evangile selon St Jean 16,33